Récemment, le rabbin David Stav, président du groupe orthodoxe modéré Tzohar, a annoncé sa candidature comme grand rabbin ashkénaze d’Israël. Stav a indiqué qu’il voulait rejoindre le rabbinat et faire une loi juive "plus pertinente" pour les Israéliens laïques.
Pour certains, ce sont des nouvelles encourageantes. Tzohar est depuis longtemps une voix demandant la réforme du Rabbinat, dont les règles semblent mystérieuses et rigides à beaucoup d’Israéliens, les éloignant ainsi du judaïsme.
D’autres, cependant, voient Stav comme représentant un même produit, dans un emballage simplement plus attrayant. Certes, Tzohar aide les gens à se conformer aux règles du rabbinat et présente une orthodoxie plus positive. Mais le problème n’est pas simplement que le rabbinat dans sa version actuelle est trop strict, aliénant et détaché de la plupart des Israéliens. Le problème est le rabbinat lui-même, et il devrait être aboli.
Beaucoup de gens sont surpris d’apprendre que le Grand Rabbinat d’Israël a peu de précédents dans l’histoire juive. Loin d’être un précepte talmudique, il ne remonte qu’à l’Empire ottoman. Les Ottomans ont permis aux non-musulmans de pratiquer une autonomie limitée en vertu de leurs propres lois religieuses. Les Grands rabbins ont été nommés pour gouverner la communauté juive, et représenter la communauté et ses intérêts devant le sultan.
Lorsque les Britanniques ont pris le contrôle du pays d’Israël, ils ont confirmé la pratique ottomane. Comme ça l’était pour les Ottomans, il était sans doute utile pour les Britanniques d’avoir un représentant juif religieux. Les Britanniques ont même étendu l’institution avec la nomination d’un rabbin ashkénaze et séfarade en plus. Pour diverses raisons, les fondateurs d’Israël ont conservé cette position.
Le modèle a pu avoir un sens pour les Ottomans et les Britanniques, mais il a également représenté une convergence du pouvoir religieux et politique qui, dans la plupart de l’histoire juive, étaient presque toujours séparés. Les anciens rois ont partagé le pouvoir avec les prophètes et les prêtres. Dans l’Antiquité tardive, des rabbins différents se divisaient les pouvoirs judiciaires, religieux et exécutifs. Ces pouvoirs séparés ont empêché le pouvoir de statuer unilatéralement.
Avec un pouvoir limité et une communauté plus petite (comme c’était le cas sous l’Empire ottoman et britannique), la combinaison du pouvoir religieux et politique n’était pas particulièrement inquiétant. Mais dans l’Etat d’’Israël moderne, où les rabbins ont la souveraineté sur une communauté juive importante et diversifiée, les choses sont bien différentes.
Aujourd’hui, les grands rabbins ont des pouvoirs législatifs, judiciaires, exécutifs et même dans des domaines tels que le mariage et le divorce, l’inhumation, la conversion et la certification casher. Ce type de consolidation du pouvoir est ce que James Madison a appelé "la définition même de la tyrannie."
L’histoire regorge de despotes qui détenaient les pouvoirs exécutif, législatif, religieux et / ou judiciaire, et les actes des rabbins en Israël sont semblables. Vous avez besoin d’une preuve ? Demandez aux femmes qui restent enchaînés à leurs maris violents, aux juifs par choix dont les conversions ont été annulées, ou aux femmes du Kotel qui ont été arrêtées pour le crime de porter un châle de prière. Il y a peu de raisons de croire que Stav gouvernerait différemment. Son groupe Tzohar "s’oppose à toute reconnaissance officielle" par Israël du judaïsme non orthodoxe, une position qui les aligne de fait au statu quo du Rabbinat.
Mais le problème ici n’est pas avec l’orthodoxie. Le rabbinat serait problématique, même si le Parti réformiste ou les rabbins conservateurs, et non des orthodoxes, devaient tenir les premières places. Et le problème n’est pas les rabbins en soi. Les rabbins ont un rôle crucial à jouer dans la direction religieuse et communautaire juive. Le problème est un Etat donnant le pouvoir gouvernemental et une autorité à des chefs religieux. Cela a toujours conduit à la persécution de ceux qui refusent d’embrasser leurs croyances.
Ironie du sort, les Juifs ont souvent subi les conséquences négatives des parrainages de l’Etat par la religion. Israël avait pour but d’offrir un refuge à des gens qui avaient souffert comme une minorité religieuse et de permettre la liberté religieuse pour ceux de tous les horizons. Israël est un modèle quand il s’agit de religions non-juives. Mais le rabbinat fait de l’Etat juif la seule démocratie du monde où les Juifs ne jouissent pas de la liberté religieuse.
A notre époque, les options sont nombreuses et l’expression juive est dynamique. Israël, notre patrie, doit reconnaître et célébrer le fait qu’il existe de nombreuses façons légitimes d’être juif. Cette diversité est à la fois un fait et une valeur. Le Talmud enseigne, qu’il y a et qu’il devrait y avoir une multitude de façons valables d’interprétation et d’observation de la tradition juive. "Il y a soixante-dix visages à la Torah." Tous les juifs israéliens devraient avoir le droit de vivre la plénitude de leur identité juive en fonction de leurs croyances et des exigences de leur conscience, et aucun Juif ne devrait être contraint par l’État d’exercer une marque du judaïsme avec lequalle il ou elle n’est pas d’accord.
Seule l’abolition du Grand Rabbinat d’Israël peut tenir la promesse de la liberté religieuse pour tous ses citoyens. Et le temps est venu.
Michael Knopf, Haaretz, 27 janvier 2013
Traduit et adapté de l’anglais par Misha Uzan – Jforum / Correspondant spécial en Israël
Michael Knopf est le rabbin adjoint du Temple Har Zion à Penn Valley, en Pennsylvanie, et un rabbin sans frontière. On peut le suivre sur Facebook à l’adresse www.facebook.com/rabbiknopf
Pour certains, ce sont des nouvelles encourageantes. Tzohar est depuis longtemps une voix demandant la réforme du Rabbinat, dont les règles semblent mystérieuses et rigides à beaucoup d’Israéliens, les éloignant ainsi du judaïsme.
D’autres, cependant, voient Stav comme représentant un même produit, dans un emballage simplement plus attrayant. Certes, Tzohar aide les gens à se conformer aux règles du rabbinat et présente une orthodoxie plus positive. Mais le problème n’est pas simplement que le rabbinat dans sa version actuelle est trop strict, aliénant et détaché de la plupart des Israéliens. Le problème est le rabbinat lui-même, et il devrait être aboli.
Beaucoup de gens sont surpris d’apprendre que le Grand Rabbinat d’Israël a peu de précédents dans l’histoire juive. Loin d’être un précepte talmudique, il ne remonte qu’à l’Empire ottoman. Les Ottomans ont permis aux non-musulmans de pratiquer une autonomie limitée en vertu de leurs propres lois religieuses. Les Grands rabbins ont été nommés pour gouverner la communauté juive, et représenter la communauté et ses intérêts devant le sultan.
Lorsque les Britanniques ont pris le contrôle du pays d’Israël, ils ont confirmé la pratique ottomane. Comme ça l’était pour les Ottomans, il était sans doute utile pour les Britanniques d’avoir un représentant juif religieux. Les Britanniques ont même étendu l’institution avec la nomination d’un rabbin ashkénaze et séfarade en plus. Pour diverses raisons, les fondateurs d’Israël ont conservé cette position.
Le modèle a pu avoir un sens pour les Ottomans et les Britanniques, mais il a également représenté une convergence du pouvoir religieux et politique qui, dans la plupart de l’histoire juive, étaient presque toujours séparés. Les anciens rois ont partagé le pouvoir avec les prophètes et les prêtres. Dans l’Antiquité tardive, des rabbins différents se divisaient les pouvoirs judiciaires, religieux et exécutifs. Ces pouvoirs séparés ont empêché le pouvoir de statuer unilatéralement.
Avec un pouvoir limité et une communauté plus petite (comme c’était le cas sous l’Empire ottoman et britannique), la combinaison du pouvoir religieux et politique n’était pas particulièrement inquiétant. Mais dans l’Etat d’’Israël moderne, où les rabbins ont la souveraineté sur une communauté juive importante et diversifiée, les choses sont bien différentes.
Aujourd’hui, les grands rabbins ont des pouvoirs législatifs, judiciaires, exécutifs et même dans des domaines tels que le mariage et le divorce, l’inhumation, la conversion et la certification casher. Ce type de consolidation du pouvoir est ce que James Madison a appelé "la définition même de la tyrannie."
L’histoire regorge de despotes qui détenaient les pouvoirs exécutif, législatif, religieux et / ou judiciaire, et les actes des rabbins en Israël sont semblables. Vous avez besoin d’une preuve ? Demandez aux femmes qui restent enchaînés à leurs maris violents, aux juifs par choix dont les conversions ont été annulées, ou aux femmes du Kotel qui ont été arrêtées pour le crime de porter un châle de prière. Il y a peu de raisons de croire que Stav gouvernerait différemment. Son groupe Tzohar "s’oppose à toute reconnaissance officielle" par Israël du judaïsme non orthodoxe, une position qui les aligne de fait au statu quo du Rabbinat.
Mais le problème ici n’est pas avec l’orthodoxie. Le rabbinat serait problématique, même si le Parti réformiste ou les rabbins conservateurs, et non des orthodoxes, devaient tenir les premières places. Et le problème n’est pas les rabbins en soi. Les rabbins ont un rôle crucial à jouer dans la direction religieuse et communautaire juive. Le problème est un Etat donnant le pouvoir gouvernemental et une autorité à des chefs religieux. Cela a toujours conduit à la persécution de ceux qui refusent d’embrasser leurs croyances.
Ironie du sort, les Juifs ont souvent subi les conséquences négatives des parrainages de l’Etat par la religion. Israël avait pour but d’offrir un refuge à des gens qui avaient souffert comme une minorité religieuse et de permettre la liberté religieuse pour ceux de tous les horizons. Israël est un modèle quand il s’agit de religions non-juives. Mais le rabbinat fait de l’Etat juif la seule démocratie du monde où les Juifs ne jouissent pas de la liberté religieuse.
A notre époque, les options sont nombreuses et l’expression juive est dynamique. Israël, notre patrie, doit reconnaître et célébrer le fait qu’il existe de nombreuses façons légitimes d’être juif. Cette diversité est à la fois un fait et une valeur. Le Talmud enseigne, qu’il y a et qu’il devrait y avoir une multitude de façons valables d’interprétation et d’observation de la tradition juive. "Il y a soixante-dix visages à la Torah." Tous les juifs israéliens devraient avoir le droit de vivre la plénitude de leur identité juive en fonction de leurs croyances et des exigences de leur conscience, et aucun Juif ne devrait être contraint par l’État d’exercer une marque du judaïsme avec lequalle il ou elle n’est pas d’accord.
Seule l’abolition du Grand Rabbinat d’Israël peut tenir la promesse de la liberté religieuse pour tous ses citoyens. Et le temps est venu.
Michael Knopf, Haaretz, 27 janvier 2013
Traduit et adapté de l’anglais par Misha Uzan – Jforum / Correspondant spécial en Israël
Michael Knopf est le rabbin adjoint du Temple Har Zion à Penn Valley, en Pennsylvanie, et un rabbin sans frontière. On peut le suivre sur Facebook à l’adresse www.facebook.com/rabbiknopf
Quel avant-gardiste ce Knopf ! Que sait-il du fond de sa Pennsylvanie de la liberté religieuse des juifs d’Israël ? pas grand chose.... Les méchants orthodoxes poursuivent-ils les mécréants avec des lances ? Rien de tout cela, les juifs en Israël, comme ailleurs dans le monde font ce qu’ils veulent. On les connait par coeur tous ces discours, c’est toujours la même chose "je veux fumer le Shabbat et prendre ma voiture, mais je ne veux pas que cela soit vu comme une faute" Vous faites ce que vous veoulez, vous n’etes pas plus moderne que moi mais de là à vous désigner comme les nouveaux guides spirituels du judaïsme, faut pas pousser. Monsieur Knopf, aller vous allonger un peu chez le psy qui vous expliquera, si il est bon, que le judaïsme que vous souhaitez vous concerne en premier chef et qu’il est peu légitime d’en faire un modèle, même si un grand nombre partage votre point de vue car la Torah est entière et ne se marchande pas. Longue vie à nos Grands Rabbins d’Israël qui protègent l’authenticité de notre Torah, afin que D.ieu continue de protéger notre pays.
RépondreSupprimerBenjamin
"Ils font ce qu’ils veulent", ça dépend pour quoi. Ils peuvent prendre leur voiture le shabat, ça dépend où. Des quartiers de Jérusalem, Bne Brak ou d’autres villes ultra-orthodoxes sont fermés et il est impossible d’y pénétrer. Mais ça c’est pour ceux qui sont une voiture, que dites-vous à tous ceux qui n’ont pas les moyens de s’en offrir et qui n’ont que le shabbat pour voir leur famille ? Ils n’ont pas de bus et n’ont plus que le taxi, qui est hors de leur budget, ou quelques shirout à la limite. La question est là.
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